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      <titleStmt>
        <title>Mercure galant, octobre 1679 (deuxième partie) [tome 11]</title>
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        <edition>OBVIL/IReMuS</edition>
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          <name>Nathalie Berton-Blivet</name>
          <resp>Responsable éditorial</resp>
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          <name>Anne Piéjus</name>
          <resp>Responsable éditorial</resp>
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          <name>Vincent Jolivet</name>
          <resp>Informatique</resp>
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        <publisher>Sorbonne Université, LABEX OBVIL</publisher>
        <date when="2015"/>
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          <licence target="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/3.0/fr/"><p>Copyright © 2019
              Sorbonne Université, agissant pour le Laboratoire d’Excellence « Observatoire de la
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            souhaitable.</p></licence>
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        <bibl><title>Mercure galant</title>, octobre <date>1679</date> (deuxième partie) [tome
          11].</bibl>
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        <date when="1679-10"/>
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      <div type="article" xml:id="MG-1679-10b_043" resp="mercure">
        <head>[Cérémonie du mariage de Mademoiselle]</head>
        <bibl>Mercure galant, octobre 1679 (deuxième partie) [tome 11], p. 43-204</bibl>
        <p/>
        <p>Le jour suivant, qui fut le dernier du mois, le bruit des Tambours annonça dés le lever
          du Soleil, ce qui se devoit exécuter peu d'heures apres pour une plus entiere union des
          deux plus grandes Monarchies de la terre. Avant que d'entrer dans ce détail, je vous diray
          que toute la dépense des Cerémonies qui se font en France, apres avoit esté commandée par
          le Roy, est ordonnée, ou par le Surintendant des Bâtimens, quand on le fait dans des lieux
          ouverts ; ou par le Premier Gentilhomme de la Chambre d'année, quand elles se font dans
          des lieux fermez. Comme celle du Mariage de Mademoiselle s'est faite dans la grande
          Chapelle de Fontainebleau, ç'a esté à M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de Gesvres, pour lors
          Premier Gentilhomme de la Chambre, à en ordonner toute la dépense. Ainsi ce fut luy qui
          fit préparer cette Chapelle. M<hi rend="sup">r</hi> Duché, Intendant &amp; Controlleur
          Genréral de l'Argenterie, &amp; des menus Plaisirs de Sa Majesté, prit soin sous ses
          ordres de toutes les choses dont il se reposa sur luy.</p>
        <p>La Chapelle dont je vous parle est la plus grande de trois qu'il y a en cette Maison
          Royale. On l'appelle depuis longtemps <hi rend="i">la belle Chapelle</hi>, &amp; elle est
          en effet une des plus belles du Royaume. Les Religieux de l'Ordre de la Trinité &amp;
          Redemption des Captifs, en sont Chapelains. Ce sont ceux que le Peuple appelle communément
          Maturins, à cause de l'ancien patron de leur Eglise de Paris S. Maturin, qui n'estoit pas
          Religieux de cet Ordre fondé longtemps depuis sa mort, mais Prestre séculier, natif de
          Larchant au Diocese de Sens. Ces Religieux ayant suivy S. Louis en son premier Voyage de
          la Terre-Sainte, rendirent de si grandes assistances aux Malades &amp; aux Blessez de son
          Armée, qu'à son retour ce grand Prince les retint aupres de luy par reconnoissance, &amp;
          leur fit bâtir une Eglise dans la Maison Royale de Fontainebleau, où ils ont toûjours fait
          l'Office, jusqu'à ce qu'on l'an 1608. le Roy Henry IV.prenant dessein de l'embellir, les
          fit passer dans la Court du Donjon ou de l'Ovale, où ils ont encor une autre petite
          Chapelle fondée par Loüis VII. &amp; déservie avant eux par un Chapelain, qui avec
          l'agrémens de S. Loüis, prit l'Habit de cet Ordre, ainsi que deux Officiers de sa Maison ;
          &amp; en mesme temps ce pieux Monarque donna aux Religieux cette petite Chapelle, avec le
          Logement de ce Chapelain, le droit de Commensalité qu'il avoit, &amp; les autres
          Privileges dont il joüissoit, sans parler de plusieurs autres qui y furent adjoûtez. Ils
          ont esté quelque temps en cette petite Chapelle ; &amp; depuis peu le Roy voyant cette
          premiere en état, &amp; la jugeant propre &amp; commode pour sa Personne &amp; pour sa
          Suite, a ordonné aux mesmes Religieux d'y retourner, &amp; d'y continuer le Service. Ainsi
          on peut dire qu'elle est ancienne &amp; moderne tout ensemble. Quand S. Loüis la fit
          bâtir, elle estoit en partie où est aujourd'huy l'entrée de la nouvelle. Cela paroist par
          une vieille Arcade d'un ordre Gotique qu'on voit encor au fond de la Nef dans la derniere
          Chapelle à main droite en entrant. Il semble qu'on l'y ait laissée à dessein pour
          conserver quelque marque de son ancienneté, en memoire de la sainteté de son Fondateur.
          L'autre partie estoit à l'endroit où l'on voit présentement le grand Escalier de la Court
          du Cheval blanc. François I. voulant amplifier le Chasteau, fit abatre cette ancienne
          Chapelle. Elle fut rebâtie par ses ordres en l'honneur de la Trinité, à laquelle elle
          avoit esté d'abord dédiée. Quant à sa situation, elle est entre la Court du Cheval blanc
          &amp; le Jardin de la Reyne, ayant son entrée principale au Midy. Sa longueur est de vingt
          toises, quatre de large, &amp; huit de haut. Elle est composée de seize Chapelles voûtées,
          huit de chaque costé, sans y comprendre le grand Autel.</p>
        <p>Diane de Valentinois estant en faveur sous Henry II fit orner une de ces Chapelles. C'est
          la quatriéme à main gauche en entrant dans cette Eglise. Elle fut embellie par ses soisn
          d'une Table d'Autel d'argent, d'un beau &amp; riche Lambris, &amp; d'une grande Cloison de
          Balustres qui la fermoit, où se voyoient plusieurs de ses Chifres avec des Fleches. Il y
          en avoit une entr'autres qui estoit sa Devise, autour de laquelle on lisoit ces mots
          Latins, <hi rend="i">Consequitur quotcumque petit.</hi> Le Roy y ayant fait travailler il
          n'y a pas longtemps, cette Cloison a esté ostée, &amp; on y en a remis une autre de mesme
          ordre que celles qui sont de niveau aux autres Chapelles, mais c'est encor le mesme
          Lambris &amp; la mesme Table d'Autel, excepté qe l'un &amp; l'autre ont esté peints &amp;
          dorez depuis peu.</p>
        <p>La gloire de l'embellissement de cette Chapelle &amp; des Ouvrages singuliers qu'on y
          voit, est deuë à Henry IV. &amp; à Loüis XIII. son Fils. Le premier a fait commencer les
          Peintures &amp; les Sculptures, &amp; l'autre les a fait continuer. La Voûte est un
          Ceintre en berçeau, composé d'un grand Compartiment qui regne depuis un des bouts de cette
          Eglise jusqu'à l'autre, avec son Arrachement ou grande Corniche qui la soûtient. Ce
          Compartiment est distingué en trois grands Quadres ou Bordures de Tableaux qui sont au
          milieu de cette Voûte, &amp; en deux autres Bordures en forme de Cartouches qui sont aux
          deux extrémitez, avec deux Anges de relief plus grands que le naturel, qui soûtienent les
          Armes de France &amp; de Navarre. Vingt-deux grandes autres Bordures ovales, &amp; seize
          Quadres, embellissent fort ce Compartiment. Il est de Stuc, d'un pied ou environ de
          relief, enrichy de Moulures, Cardrons, Oves, avec diverses Moresques &amp; Fleurons d'or.
          Ces Quadres &amp; ces Bordures sont remplis d'autant de Tableaux d'une beauté admirable.
          Ils sont du celebre Freminet, dont Henry IV. fit choix pour travailler aux Peintures. On
          ne peut les voir sans estre persuadé qu'il excelloit en son Art, &amp; qu'il n'y estoit
          pas moins judicieux que sçavant.</p>
        <p>Le Lambris de cette Chapelle bien peint &amp; doré, est un des plus beaux qu'on puisse
          voir. Il a dix-sept pieds &amp; demy de haut, d'un ordre de Corinthe, &amp; est composé de
          vingt Pilastres avec leurs Bases, Chapiteaux, Corniches, Frises, &amp; de divers autres
          enrichissemens, comme de testes de Chérubins, de Festons, de Fleurs de Lys, des Chifres du
          Roy &amp; de la Reyne ; le tout en basse taille, outre les Clostures en balustres des
          Chapelles de mesme ordre que le reste. Sur la grande Corniche de ce Lambris, au bas des
          trémeaux des Fenestres, sont posez vingt-huit Anges de relief, qui tiennent un Sceptre
          d'une main, &amp; les Chifres de Leurs Majestez de l'autre. Entre les trémeaux au dessus
          de ces vingt-huit Anges, il y a quatorze Ovales, sept de chaque costé, toutes remplies de
          Tableaux, avec seize Testes de Chérubins au dessus, accompagnez de Festons.</p>
        <p>Au bas de la Nef, au dessus de la Porte, est un grand Balcon soûtenu de dix grosses
          Colomnes canelées. Chacune a quinze pieds de hauteurs, &amp; est de pareil ordre &amp;
          enrichissement de dorures que le Lambris.</p>
        <p>Le grand Autel de cette Chapelle réond aux merveilles que je viens de vous décrire. Il
          est entierement de Marbre blanc, de cinq toises de haut, &amp; de quatre &amp; demie de
          large. L'Ouvrage est du S<hi rend="sup">r</hi> Bourdoni. Il y a quatre grandes Colomnes
          d'ordre de Corinthe, d'un Marbre tanelé fort rare, avec leurs Bases &amp; Chapiteaux de
          Bronze doré à feu. Elles ont chacune leur Piédestal enrichy des Chifres du Roy &amp; de
          Palmes de Bronze doré. Les Friches de la Corniche qui est soûtenuë par de petits Consoles,
          ont aussi des Palmes &amp; des Chifres, le tout de Bronze &amp; doré à feu comme le reste.
          Entre ces Colomnes dans le milieu de l'Autel, il y a un Tableau qui représente la Trinité.
          Il a treize pieds de haut, &amp; sept de large. La Bordure est richement embellie de
          divers petits Compartimens d'un tres-beau Marbre. La Table d'Autel est d'une grande pierre
          de Marbre blanc, dont le devant est orné d'un grand Soleil de Bronze doré à feu, &amp;
          posé sur un Marbre gris, ayant à chaque costé deux autres petites Tables toutes parsemées
          de Fleurs de Lys de Bronze, &amp; dorées. Il y a aussi deux grandes Niches des deux
          costez. Dans l'une est la Statuë de S. Charlemagne, &amp; dans l'autre celle de S. Loüis.
          Elles sont de Marbre blanc, &amp; chacune d'environ sept pieds de haut. Au dessus des
          mesmes Colomnes on voit quatre Anges de Bronze, qu'on peut dire d'une beauté achevée. On
          n'a point voulu les faire dorer, de peur qu'on ne les crust d'une autre maniere. Chacun a
          six pieds de haut. Le premier tient une Epée d'une main, &amp; une Balance de l'autre. Le
          second &amp; le troisiéme tiennent chacun un Encensoir ; &amp; le quatriéme porte de la
          main droite une Couronne d'êpines, &amp; de la gauche, une Palme. Dans l'amortissement de
          l'Autel, au dessus de ces quatre Anges, il y a quatre grands Vases, d'où sortent des
          flâmes qui embellissent fort cet Ouvrage. Ces Vases sont de Bronze doré, aussi bien que
          les Armes du Roy posées au dessus du Tableau, &amp; accompagnées de Festons ; &amp; plus
          haut, un autre grand Feston de mesme matirer, avec une Table de Marbre noir, où ce qui
          suit est écrit en lettre d'or.</p>
        <l>IN HONOREM SANCTISSIMAE</l>
        <l>ET INDIVIDUAE TRINITATIS,</l>
        <l>LUDOVICUS IUSTUS XIII.</l>
        <l>FRANCORUM ET NAVARRAE</l>
        <l>REX CHRISTIANISSIMUS</l>
        <l>DEDICAVIT, ANNO DOMINI</l>
        <l>M. DC. XXXIII.</l>
        <p>Il me reste à vous parler du Pavé de cette Chapelle. Rien n'est plus riant aux yeux, soit
          pour la diversité de ses ouvrages, soit pour sa matiere. Il est tout de Marbre blanc, sur
          lequel sont plusieurs grands &amp; divers Compartimens composez d'une infinité de
          diférentes pieces de Marbre des plus beaux &amp; des plus rares qu'on puisse voir. Le
          dessein en est encor du S<hi rend="sup">r</hi> Bourdoni, &amp; assurément il n'y a rien de
          plus beau dans toute l'Europe. Sa Majesté fait faire présentement un Tabernacle au grand
          Autel, avec une riche Chapelle de vermeil doré, qui donnera à ce superbe Edifice le seul
          ornement qui y manque.</p>
        <p>Cette Chapelle estant aussi belle que je vous la viens représenter, tant par la dorure
          &amp; la sculpture, que par les Figures &amp; les Tableaux, il esut esté inutile d'y
          adjoûter d'autres ornemens le jour du Mariage de Mademoiselle. Ainsi on se contenta de
          mettre une grande Croix &amp; six Chandeliers tres-riches sur l'Autel. On avoit osté
          toutes les Cloisons des Chapelles, afin d'y dresser des Echafauts. Chacun pouvoit contenir
          quatre ou cinq Personnes de face à deux Bans de profondeur. Il y avoit des Sieges au
          dessus en pareil nombre, en sorte qu'en chacun des deux étages il y avoit place pour huit
          Personnes. Les Balustres qui sont de niveau aux Fenestres, avoient esté prolongez par des
          Echafauts de mesme largeur, pour contenir deux Bancs dans leur espace. Il y eut des
          Echafauts à huit ou dix étages, dressez sous les Orgues dans le fond. Tous les appuis
          furent couverts de riches Tapis à fond d'or &amp; d'argent ; &amp; les Bancs, de velours
          bleu à Fleurs de Lys d'or. Ce qu'il y eut d'admirable, ce fut de voir les Tribunes, les
          Echafauts, &amp; les Bancs, remplis de tous costez sans confusion. Vous sçavez, Madame,
          qu'elle est presque inséparable des grandes Cerémonies. Cependant M<hi rend="sup">r</hi>
          le Duc de Luxembourg Capitaine des Gardes en quartier, donna de si bons ordres, &amp; les
          fit si bien exécuter, qu'on ne s'apperçeut presque point que c'estoit une Feste
          extraordinaire. M<hi rend="sup">r</hi> de Saintot Maistre des Cerémonies, ne contribua pas
          peu à ce grand ordre, tant il régla bien tout ce qui regardoit ses fonctions, tant il prit
          bien ses lesures pour les places de ceux qui avoient rang à cette Cerémonie, &amp; tant il
          les fit entrer à propos, &amp; en des temps diférens, pour éviter l'embarras.</p>
        <p>Sur les dix heures &amp; demie, Monsieur alla prendre Mademoiselle pour l'amener chez le
          Roy. Ce prince avoit un Habit à fond brun, brodé d'or trait, &amp; de Perles, avec de
          grandes Boutonnieres de gros Diamans, la Croix de l'Ordre, &amp; l'Epée de mesme. La
          Garniture en estoit aussi riche que singuliérement belle. Mademoiselle avoit un Manteau
          Royal de Velours violet, orné d'un bord de Fleurs de Lys d'or à trois rangs, bordez d'un
          parement d'Hermine large de cinq pouces. Le Colet estoit d'Hermine, &amp; tout le Manteau
          en estoit doublé. Elle avoit sa Robe du mesme Velours que le Manteau, le Corps &amp; les
          Manches semez de Fleurs de Lys. Les renvers des Manches &amp; le Surcot estoient aussi
          d'Hermine, &amp; ornez de Diamans. Le Surcot est une piece qui forme la taille du Corps.
          On luy donnoit ce nom anciennement. Le bas de sa Robe, ou la Jupe tenante au Corps, estoit
          courte, &amp; de Velours violet, avec une Bande d'Hermine autout du bord d'enbas, &amp;
          une Bande l'arge de six pouces par devant, ornée de Diamans, avec une autre Bande de
          chaque costé de Fleurs de Lys à trois rangs, &amp; une de mesme par le bas autour de la
          Jupe. Les Bas estoient de Soye violete semez de Fleurs de Lys de broderie d'or. Autrefois
          les Reynes portoient des Brodequins qui alloient jusqu'à la jartiere. Les Souliers
          estoient de Satin violet, brodez de Fleurs de Lys d'or. La queuë du Manteau Royal avoit
          six aunes de long. Vous trouverez tout ce que je vous dis dans le Portrait que je vous
          envoye de cette Princesse.<note resp="author" place="margin"><hi rend="i">Avis pour placer
              les Figures</hi> : Le Portrait de la Reyne d’Espagne, doit regarder la page
          81.</note>Il est gravé sur le même Dessein dont on s'est servy pour faire l'Habit.
          Mademoiselle de Grançey, à present sa Dame d'Atour, portoit sa Couronne Royale, garnie de
          Pierreries, &amp; en estoit Elle-mesme toute brillante. Cette COuronne estoit d'or, ayant
          la Croix de dessus de Diamans, &amp; la forme de la Couronne d'Espagne. Si-tost que
          Mademoiselle fut entrée dans l'Apartement du Roy, on luy attacha cette Couronne sur la
          teste. La Reyne &amp; les Princesses s'y rendirent dans le mesme temps, ainsi que Monsieur
          le Prince de Conty &amp; M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de los Balbasés. M<hi
            rend="sup">r</hi> le Comte de Brionne, accompagné de M<hi rend="sup">r</hi> de Bonneüil,
          estoit allé prendre cet Ambassadeur en la place de M<hi rend="sup">r</hi> le Chevalier de
          Lorraine, auquel il estoit survenu quelque indisposition la nuit précedente. Il l'avoit
          fait entrer dans l'un des Carrosses de Leurs Majestez, avec M<hi rend="sup">r</hi> le Duc
          des Sesto son Fils, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de S. Pierre son Gendre, &amp;
          ayant traversé la Court au milieu des Compagnies des Gardes rangez en haye, ils estoient
          allez chez Monsieur le Prince de Conty qui les attendoit pour venir ensemble dans
          l'Apartement de Sa Majesté.</p>
        <p>Ce jeune Prince qui devoit représenter la Personne du Roy d'Espagne dans cette grande
          Cerémonie, estoit en Manteau court &amp; Pourpoint, le Haut de chausse fort large. Le
          Manteau &amp; les Chausses estoient d'une Etofe noire, rebrodée de petits Carreaux de soye
          aurore. Sur cette Etofe couroit une maniere de Chaîne faisant un compartiment entrelassé
          de Fleurons &amp; Fleurs naturelles de Satin noir découpé, lizeré de Perles de diférentes
          grosseurs, suivant la forme des ornemens. Toutes ces Chaînes &amp; ces Fleurons estoient
          ornez de Diamans qui formoient les cœurs &amp; les tiges. Ce qui est particulierement
          remarquable, c'est que tout les ornemens dont je vous parle n'avoient esté dessinez que
          sur la forme des Diamans destinez pour cet Habit, &amp; qu'il sembloit qu'ils eussent esté
          taillez exprés pour cet Ouvrage. Les paremens du Manteau estoient d'un Satin autore à
          Fleurons liserez de Chenilles noires, &amp; ornez de Diamans &amp; de Perles. Le Pourpoint
          estoit comme les paremens du Manteau. Jamais on ne vit un Habit si riche ny plus
          ingénieusement accommodé. On prétend qu'il y avoit pour douze millions de Pierreries.</p>
        <p>M<hi rend="sup">r</hi> de los Balbasés avoit un Habit à l'Espagnole, brodé d'or, avec des
          Boutonnieres à queuës, dans lesquelles il y avoit de gros Diamans. Son Cordon estoit d'un
          tres grand prix. Il fut admiré de tout le monde, quoy que sur les Habits de toutes les
          Personnes Royales ce ne fussent que Pierreries d'une richesse presque inestimable. Les
          Pages de Monsieur le Prince de Conty avoient un Pourpoint de Satin bleu, avec des Trousses
          de Drap isabelle, &amp; de grands Canons de Tadetas blanc. Le galon qui servoit
          d'embellissement à leurs Habits, estoit un velouté bleu, accompagné d'un petit passement
          de chaque costé, bleu, blanc, noir, &amp; couleur de Rose.</p>
        <p>Le Roy fit commencer la marche à onze heures. Voicy dans quel ordre on alla à la
          Chapelle. Quatre Tambours de la Chambre, avec leurs Fifres, &amp; huit Trompetes sonnant
          des fanfares, précedoient cinq Hérauts d'Armes avec leurs Casaques de Velours violet,
          semées de Fleurs de Lys d'or, aux extrémitez desquelles on voyoit écrit en lettres d'or le
          nom des Provinces dont ils portent le titre. M<hi rend="sup">r</hi> le Président de Mesme
          Prévost des Ordres de Sa Majesté, marchoit en suite à la teste de dix Chevaliers en Habits
          noirs &amp; Manteaux, revestus de leurs Colliers. Ces dix Chevaliers estoient M<hi
            rend="sup">r</hi> de S. Simon, M<hi rend="sup">r</hi> de Créquy, M<hi rend="sup">r</hi>
          de Roquelaure, M<hi rend="sup">r</hi> de Gordes, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> de Vaillac,
          tenant la droite. M<hi rend="sup">r</hi> le Maréchal Duc de Villeroy, M<hi rend="sup"
            >r</hi> le Duc de Villeroy, M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de S. Aignan, M<hi rend="sup"
            >r</hi> du Lude, M<hi rend="sup">r</hi> de Beringhen, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> le
          Maréchal d'Estrades, estoient à la gauche. M<hi rend="sup">r</hi> de Hautfort, &amp; M<hi
            rend="sup">r</hi> le Duc de Montaufier, n'y tinrent point de rang comme Chevaliers, le
          premier estant aupres de la Reyne, &amp; l'autre aupres de Monseigneur le Dauphin.</p>
        <p>M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de Crussol choisy &amp; nommé par Sa Majesté pour porter
          les Honneurs pour le Roy d'Espagne, alloit apres ces dix Chevaliers. Il avoit un Habit
          couleur de noisete, brodé de Perles, du plus beau Dessein, &amp; le moins embarrassé qui
          fut jamais. Il estoit en Reingrave &amp; en Juste-au-corps. Le dedans des tiges &amp; des
          fleurons estoient ornez de Perles de toutes grosseurs, selon qu'elles convenoient le mieux
          à l'ornement. Les Boutons &amp; les Boutonnieres estoient de Diamans au devant, aux
          costez, &amp; derriere son Juste-au-corps. Les Manches estoient garnies de tres-belles
          Pierreries sur le bras. Une magnifique Attache fermoit son Bouquet de Plumes. Le fond de
          son Baudrier estoit de la couleur de l'Habit, avec des Boutonnieres de Diamans aux deux
          bouts. Ainsi il n'y avoit que trois ou quatre pouces de vuide entre les Boutonnieres,
          &amp; ce vuide estoit brodé de grosses Perles comme l'Habit. Les Boucles du Baudrier
          faites exprés, estoient composées des plus beaux &amp; des plus gros Diamans qui se
          voyent. Son Epée brilloit aussi toute de Diamans. On fait monter ce qu'il en avoit, à plus
          de trois millions. Son ajustement attira l'admiration de tout le monde, non seulement par
          sa richesse &amp; par son éclat, mais par un je-ne-sçay quoy si bien entendu, que la
          maniere en plaisoit encor plus que tout le reste. Jamais rien de plus galant ny de mieux
          imaginé. Figurez-vous M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de Crussol dans cette parure. Son air
          haut, sa bonne mine, &amp; sa grace ordinaire en tout ce qu'il fait, vous persuaderont
          aisément qu'il n'y eut personne dont il ne se fist regarder plus d'une fois.</p>
        <p>Apres venoient Monsieur le Grand Prieur de France &amp; Monsieur le Duc de Vendosme son
          Frere. Monsieur le Duc de Verneüil les suivoit avec Monsieur le Duc du Maine, Monsieur le
          Comte de Vermandois, &amp; Monsieur le Prince de la Roche-sur-Yon. M<hi rend="sup">r</hi>
          le Marquis de los Balbasés ne l'éloigna point de Sa Majesté, toûjours accompagné de M<hi
            rend="sup">r</hi> le Comte de Brionne, reçeu en survivance à la Charge de Grand Ecuyer
          de France. Monsieur le Prince de Conty marchoit immédiatement devant le Roy. Cet auguste
          &amp; redoutable Monarque estoit précedé de deux Huissiers de la Chambre, avec leurs
          Masses de vermeil doré, &amp; environné de M<hi rend="sup">r</hi> le Maréchal Duc de
          Luxembourg, Capitaine des Gardes du Corps ; de M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de Gesvres,
          Premier Gentilhomme de la Chambre ; de M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de Tillader,
          Capitaine des Cent Suisses de la Garde ; de M<hi rend="sup">r</hi> le Prince de Marsillac,
          Grand Maistre de la Garderobe ; &amp; d'autres grands Officiers. Il avoit un Habit de Gros
          de Tours, en broderie d'or. On ne voyoit presque point d'Etofe, parce qu'il y avoit un
          fond de couchure d'or. La broderie estoit à compartimens appellez à compas, remplis de
          ramages &amp; de grandes &amp; petites fleurs, &amp; en quelques endroits on voyoit des
          Lames treillissées, c'est à dire à demy couvertes de tissus d'or, pour en empescher le
          grand éclat ; de maniere que ce brilland sourd, ce fond de couchure, &amp; la broderie,
          quoy que délicate, un peu relevée sur cette couchure, faisoient admirer le plus magnifique
          Habit qu'on eust encor veu sans Diamans &amp; sans Pierreries. Son Baudrier êtoit brodé de
          la mesme sorte, &amp; garny d'une Frange d'or à campanes, tres-belle &amp; tres-riche, des
          Boucles de gros Diamans qui assorissoient l'Epée qu'on estime douze cens mille livres. Au
          lieu où l'on met le Saint Esprit, je veux dire celuy qu'on attache au Juste-à-corps, &amp;
          non pas celuy qui pend au Cordon bleu, il y avoit des Diamans qui en formoient un d'une
          extraordinaire beauté. Ses Bas n'estoient pas moins à admirer. Ils estoient d'or, &amp;
          marquoient le dessein de la mesme broderie de l'Habit qui avoit une Garniture de couleur
          de rose, couverte d'un Point-d'Espagne d'or tres-artistement fait. Le Chapeau où estoit
          attaché un tres-beau Bouquet de Plumes de couleur de rose, le faisoit distinguer d'entre
          toutes les Personnes de qualité qui en avoient, par la maniere dont le Roy se les fait
          accomoder par les Officiers de sa Garderobe. Ce superbe ajustement auroit donné de l'éclat
          à tout autre qu'à ce Grand Monarque, mais il n'en tire que de la majesté de sa Personne,
          &amp; elle brille tellement &amp; sur son visage &amp; dans son port, qu'on ne peut jetter
          les yeux sur Luy, sans le reconnoistre pour le Maistre de tous ceux qui l'environnent.</p>
        <p>La Reyne venoit apres Luy, menée par M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de la Viéville son
          Chevalier d'Honneur, &amp; par M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de Hautefort son Premier
          Ecuyer. Ce dernier avoit son Collier de l'Ordre. L'Habit de la Reyne estoit de Toile d'or,
          tres-riche, avec trois rangs de grande broderie d'or, &amp; une profusion de Perles &amp;
          de Diamans d'une grosseur extraordinaire. Sa Mante de Point-d'Espagne d'or, &amp; qui
          avoit neuf aunes de long, estoit portée par Madame la Duchesse de Richelieu sa Dame
          d'Honneur.</p>
        <p>Mademoiselle suivoit la Reyne, menée par Monseigneur le Dauphin, ayant derriere luy M<hi
            rend="sup">r</hi> le Duc de Montauher avec son Collier de l'Ordre, &amp; par Monsieur,
          derriere lequel estoit M<hi rend="sup">r</hi> le Chevalier de Chastillon, Capitaine de ses
          Gardes. La beauté de cette Princesse, &amp; une douceur assi charmante que majestueuse
          qu'on voyoit répanduë sur tout son visage, marquoient tellement ce qu'elle alloit devenir,
          qu'elle n'avoit point besoin de la Couronne qu'on venoit de luy mettre sur la teste, pour
          faire connoistre que c'estoit à Elle à qui le Roy d'Espagne l'avoit destinée. La queuë de
          sa Mante, qui avoit six aunes de long, estoit portée par Mademoiselle d'Orleans du costé
          droit, par Madame la Grande Duchesse de Toscane du costé gauche, &amp; l'extrémité par
          Madame la Duchesse de Guise. Ces trois Princesses avoient chacune une Mante de
          Point-d'Espagne d'or. Celle de la premiere estoit portée par M<hi rend="sup">r</hi> le
          Comte d'Escars ; celle de la seconde, par M<hi rend="sup">r</hi> le Comte de Sainte Mesme,
          dont le Chapeau estoit orné d'un Cordon &amp; d'une Agrafe de Diamans de tres-grand prix ;
          &amp; celle de la troisiéme, par M<hi rend="sup">r</hi> le Chevalier de Mailly.</p>
        <p>Je ne vous diray rien de Monseigneur le Dauphin. L'air grand &amp; aisé qu'on luy
          remarque tous les jours lors qu'il fait ses Exercices, &amp; qui luy attire l'admiration
          de tout le monde, parle assez avantageusement de sa Personne, sans qu'il soit necessaire
          que je vous en entretienne, puis que vous devez sçavoir ce qui est connu de toute la
          terre. Ce Prince avoit un Habit à fond brun, tout couvert d'une broderie d'or meslée d'un
          peu d'argent. Sa Garniture &amp; ses Plumes estoient gris de lin. Il avoit des Boutons de
          Pierreries, &amp; rien n'égaloit la beauté de celles qui formoient son Cordon de
          Chapeau.</p>
        <p>Madame marchoit en suite. M<hi rend="sup">r</hi> le Comte de Vaillac, &amp; M<hi
            rend="sup">r</hi> le Marquis de Bron, luy donnoient la main. Ce premier s'estoit tiré de
          la marche des Chevaliers, pour avoir l'honneur de la mener. L'Habit de S. Altesse Royale
          estoit d'un fond violet plein de broderie d'or. Elle avoit quantité de grosses Perles
          &amp; de Diamans à sa Coëfure, sur le Corps de sa Robe, &amp; en tous les lieux où l'on en
          met. Sa Mante de Point-d'Espagne or &amp; argent, longue de sept aunes, estoit portée par
          Madame la Maréchale Duchesse du Plessis.</p>
        <p>Elle esoit suivie de Mademoiselle de Valois, à présent Mademoiselle. M<hi rend="sup"
            >r</hi> le Marquis d'Effiat Premier Ecuyer de Monsieur, la menoit. Elle avoit une Mante
          de Gaze blanche à Fleurs naturelle de couleurs vives, avec un grand Point or &amp; argent
          par le milieu &amp; tout à l'entour. La queuë en estoit portée par M<hi rend="sup">r</hi>
          le Comte de Flamarin. Sa parure estoit de Topases &amp; de Diamans.</p>
        <p>M<hi rend="sup">r</hi> le Comte de Saint Géran menoit Mademoiselle de Blois. Sa Mante de
          Point d'or estoit portée par M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de Bouigneux, qui avoit
          pour plus de cent mille Ecus de Diamans sur son Habit, sans comprendre le Cordon de son
          Chapeau qui estoit aussi de Diamans. Ce jeune Marquis estoit nommé pour le Bal du
          lendemain ; mais les plaisirs de la Cour furent incapables de modérer l'ardeur qu'il a
          pour la guerre, &amp; apres qu'il eut pris congé de Monseigneur le Dauphin &amp; de
          Monsieur le Prince de Conty, il prit la Poste sur les huit heures du soir à Fontainebleau,
          pour se rendre aupres de M<hi rend="sup">r</hi> le Maréchal de Humieres qui estoit à Mets.
          Il a déja fait deux Campagnes où il s'est fort distingué, quoy qu'il ne soit encor que sur
          sa dix-neuviéme année, l'une au Comté de Bourgogne, l'autre en Allemagne en qualité de
          Capitaine de Cavalerie. Il estoit à l'attaque du Pont de Strasbourg, où il entra des
          premiers l'Epée à la main.</p>
        <p>Mademoiselle de Nantes estoit menée par M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de Dangeau,
          &amp; avoit une Mante de Point d'or. M<hi rend="sup">r</hi> le Chevalier de Soyecourt en
          portoit la queuë.</p>
        <p>L'ajustement de Madame la Duchesse de Verneüil, à qui M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis
          de S. Héran donnoit la main, estoit une Mante noire à fleurs d'or. La queuë en estoit
          portée par M<hi rend="sup">r</hi> le Comte de Meilly, Frere de M<hi rend="sup">r</hi> le
          Marquis de Bouligneux. Il est tres bien fait de sa personne, &amp; attaché à celle de
          Monseigneur le Dauphin, qui ne le quitte presque jamais.</p>
        <p>Les Duchesses &amp; les Dames du Palais venoient en suite en un gros, magnifiquement
          parées. Vous remarquerez qu'il n'y avoit que le Roy, les Reynes, Monseigneur le Dauphin,
          &amp; Leurs Altesses Royales, qui eussent de l'or &amp; de l'argent sur leurs Habits, car
          les Mantes des Princesses sur lesquelles il y en avoit, estant un ornement extraordinaire,
          ne sont point comptées pour faire partie d'un Habit.</p>
        <p>Cette Auguste &amp; Royale Compagnie marchant dans cet ordre, passa par une Galerie qui
          aboutit dans la Court du Cheval blanc, où l'on descend par un grand Escalier fait en Fer à
          Cheval, pour entrer dans la Chapelle. Toute l'étenduë de ce chemin estoit bordée par deux
          hayes des Gardes du Corps, des Cent Suisses, &amp; des Archers du Grand Prevost ; &amp;
          dans la Court, les Bataillons François &amp; Suisses qui avoient la garde, estoient sous
          les armes, Drapeaux déployez, &amp; Tambour batant. Quant on fut entré, Leurs Majestez
          suivies de toutes les Personnes Royales, avancerent vers une Estrade élevée de trois
          degrez, à une petite distance du grand Autel, &amp; couverte entierement d'un Tapis de
          Perse à fond d'or. Celuy-cy estoit couvert d'un autre Tapis de Velours violet, semé par
          tout de Fleurs de Lys d'or, qui occupoit seulement l'espace, où les Princesses du Sang
          devoient avoir place, apres quoy le Tapis de dessous continuoit. Au bout de l'Estrade, il
          y avoit un Prie-Dieu, au dessus duquel estoient trois Dais du mesme Velours violet, semé
          aussi de Fleurs de Lys d'or. Ces trois Dais s'unissant ensemble, n'en formoient qu'un
          seul, qui s'étendoit sur toute la largeur de l'Estrade. Le Roy &amp; la Reyne estant
          montez, se placerent aupres du Prie-Dieu, ayant derriere eux chacun un Carreau &amp; un
          Fauteüil de Velours violet, semé de Fleurs de Lys d'or. Mademoiselle se mit entre Leurs
          Majestez, mais un peu plus éloignée du Prie-Dieu. Monseigneur le Dauphin, &amp; Monsieur,
          ne quitterent point sa main ; &amp; Mademoiselle d'Orleans, Madame la Grande Duchesse,
          &amp; Madame de Guise, tinrent toûjours la queuë de sa Mante. Madame prit place derriere
          la Reyne, &amp; Mademoiselle de Valois derriere le Roy, mais un peu plus loin que Madame
          n'estoit de la Reyne. Monsieur le Prince de Conty, &amp; Monsieur le Prince de la
          Roche-sur-Yon, se placerent l'un derriere Madame, &amp; l'autre derriere Mademoiselle de
          Valois. Derriere eux estoient Monsieur le Comte de Vermandois &amp; Monsieur le Duc du
          Maine. Il formoient une ligne dont ils tenoient le milieu, &amp; avoient à leurs costez
          Mademoiselle de Blois &amp; Mademoiselle de Nantes, &amp; aux deux bouts Monsieur le Duc
          &amp; Madame la Duchesse de Verneüil. Les Duchesses qui avoient suivy la Reyne, se mirent
          sur la premiere marche du haut Dais, &amp; eurent chacune un Carreau. M<hi rend="sup"
            >r</hi> de Luxembourg, M<hi rend="sup">r</hi> de Gesvres, M<hi rend="sup">r</hi> de
          Marsillac, M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de Montausier, M<hi rend="sup">r</hi> de
          Tilladet, M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de la Viéville, M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis
          de Hautefort, &amp; les hauts Officiers de Monsieur &amp; de Madame, se mirent aussi sur
          les marches de ce mesme Dais. Du costé de la Reyne, entre le Prie Dieux, estoit tout
          proche de l'Estrade, M<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal de Bonzi Grand Aumônier de cette
          Princesse, sur un Siege de Velours cramoisy. Il avoit sa Chape de Cardinal. Elle estoit
          rouge, doublée d'Hermine. C'est ainsi que la portent les Cardinaux dans les fonctions de
          cerémonie. La queuë en est ordinairement longue de huit ou neuf aunes. M<hi rend="sup"
            >r</hi> l'Archevesque de Rheims, Grand-Maistre de la Chapelle, se mit à costé de
          celuy-cy, &amp; à la droite du Prie-Dieu, du costé où estoit le Roy, M<hi rend="sup"
            >r</hi> l'Evesque d'Orleans, Premier Aumònier de Sa Majesté, M<hi rend="sup">r</hi>
          l'Abbé de Lyonne, Fils de feu M<hi rend="sup">r</hi> de Lyonne Ministre &amp; Secretaire
          d'Etat, M<hi rend="sup">r</hi> l'Evesque d'Alet, M<hi rend="sup">r</hi> l'Abbé de S. Luc,
            M<hi rend="sup">r</hi> l'Abbé de Brou, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> l'Abbé de S.
          Vallier, Frere du Comte qui porte ce nom, Capitaine des Gardes de la Porte, tous Aumôniers
          du Roy. Le R. P. de la Chaise estoit aussi du mesme costé.</p>
        <p>Tout ceux que je viens de vous nommer, ainsi que M<hi rend="sup">r</hi> l'Abbé de Fleury
          Aumònier de la Reyne, &amp; quelques autres, qui se rangerent en ligne des deux costez du
          Prie-Dieu, tirant vers l'Autel, estoient tantost à genoux, &amp; tantost debout, comme
          Maistres de la Chapelle &amp; Officiers de Leurs Majestez ; &amp; quoy que plusieurs
          d'entre'eux eussent pû avoir rang sur les Bancs, ils aimerent mieux prendre celuy dont
          leurs fonctions particulieres leur donnoient le droit. Le Pere Ministre, ou Supérieur du
          Convent Royal des Religieux que je vous ay dit estre Chapelains de cette magnifique
          Chapelle, parut dans cette Cerémonie en Surplis &amp; avec l'Etole, à la droite de
          l'Autel, en qualité de Curé primitif, accompagné de ses Religieux. Le Curé de la Paroisse,
          qui avoit aussi l'Etole, estoit à la gauche du mesme Autel ; &amp; comme le Supérieur
          General du mesme Ordre se trouvoit alors sur les lieux, il entra à l'Eglise avec le
          Clergé, &amp; prit séance en l'un des trois Bancs couverts de Velours violet, semé de
          Fleurs de Lys d'or, préparez pour les Evesques avec lesquels il tient toûjours rang à la
          Messe du Roy, &amp; dans toutes les Cerémonies publiques.</p>
        <p>M<hi rend="sup">r</hi> le Chancelier fut conduit à la Chapelle par M<hi rend="sup">r</hi>
          de Saintot une heure avant l'arrivée du Roy. Il entra précedé d'un Lieutenant de la
          Prevosté &amp; de ses Massiers, qui se mirent à genoux à ses pieds, &amp; n'abaisserent
          leurs Masses qu'apres que Sa Majesté fut entrée. Il estoit mené par deux Gentilshommes,
          &amp; avoit M<hi rend="sup">r</hi> de Jonquieres son Secretaire, derriere luy. Tout estoit
          auguste dans sa personne, &amp; il faisoit paroistre une gravité majestueuse, digne de son
          employ &amp; de son esprit. Deux Valets de Chambre portoient la queuë de sa Robe, qui
          estoit de Velours violet, doublée de Satin rouge. Il avoit un Bonnet quarré, &amp; marcha
          suivy de M<hi rend="sup">rs</hi> les Conseillers d'Etat &amp; Maistres des requestes en
          Habits de cerémonie, c'est à dire en Robes de Satin noîr &amp; Bonnet quarré. Il y avoit
          trois Bancs destinez pour eux du costé où se dit l'Epistre, en approchant du haut Dais. Le
          premier fut occupé par M<hi rend="sup">rs</hi> de Villayer, Boucherat, &amp; de Besons ;
          le second, par M<hi rend="sup">rs</hi> Pussort, Voisin, Fieubet, Pelletier, &amp; Paget ;
          &amp; le troisiéme par M<hi rend="sup">rs</hi> Colbert, Reybere, Bignon, du Bois, Benoise,
          &amp; Vertamont. Monsieur le Chancelier eut une Chaise à bras sans dos, de Velours violet,
          à Fleurs de Lys d'or, &amp; fut placé en deçà du costé du Prie-Dieu du Roy ; car vous
          remarquerez, Madame, que la place d'honneur n'est pas celle qui est la plus proche de
          l'Autel, mais celle qui est la moins éloignée de Sa Majesté. Au dessus de ces trois Bancs,
          plus pres de l'Autel, il y en avoit trois autres qui furent remplis par le Clergé. M<hi
            rend="sup">r</hi> de Saintot avoit pris son temps pour le faire entrer. M<hi rend="sup"
            >rs</hi> les Archevesques d'Ambrun, &amp; d'Auch, &amp; M<hi rend="sup">rs</hi> les
          Evesques de Beauvais, Vence &amp; Senlis, marcherent précedez de M<hi rend="sup">r</hi>
          l'Evesque d'Alet &amp; de M<hi rend="sup">r</hi> l'Abbé de Grignan, Agens Genéraux du
          Clergé. Il pouvoit y en avoir d'autres dont on ne m'a point dit les noms. Vis-à-vis des
          trois Bancs qui estoient pour eux, il y en avoit trois autres pour M<hi rend="sup">rs</hi>
          les Ambassadeurs. M<hi rend="sup">r</hi> le Comte de Morstein Ambassadeur Extraordinaire
          de Pologne, M<hi rend="sup">r</hi> l'Abbé Scaglie de Veruë Ambassadeur de Savoye, M<hi
            rend="sup">r</hi> Taborda Envoyé Extraordinaire de Portugal, &amp; M<hi rend="sup"
            >r</hi> Bagliani Résident du Duc de Mantouë, y furent placez. Ils avoient esté conduits
          dans la Chapelle par M<hi rend="sup">r</hi> de Bonneüil le Fils, Introducteur des
          Ambassadeurs. Tous ces Bancs estoient couverts de Velours violet, semé de Fleurs de Lys
          d'or. On en avoit préparé un pour M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de los Balbasés,
          Ambassadeur Extraordinaire d'Espagne, à la gauche de ceux du Conseil. Il y fut placé entre
            M<hi rend="sup">r</hi> de Brionne &amp; M<hi rend="sup">r</hi> de Bonneüil. Tous les
          Ministres des Princes Protestans furent hors de rang, &amp; n'eurent place que dans les
          Balcons. Vis-à-vis des Bancs destinez pour le Conseil, c'est à dire du costé de
          l'Evangile, il y en avoit trois pour M<hi rend="sup">rs</hi> les Secretaires d'Etat. M<hi
            rend="sup">r</hi> le Marquis de Seignelay, M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de
          Châteauneuf, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> de Pompone, qui estoient entrez avant le Roy, y
          prirent place ; &amp; à leur droite, sur un autre Banc, M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de
          Crussol, M<hi rend="sup">r</hi> le Grand Prieur de France, &amp;M<hi rend="sup">r</hi> le
          Duc de Vendòme. Les Balcons ou Tribunes qui régnent tout autour de la Chapelle, furent
          occupez par quantité de Personnes de la plus haute qualité, qui n'avoient point de rang
          dans la Cerémonie du Mariage. Madame la Duchesse d'Osnabrug, &amp; la jeune Princesse sa
          Fille, y estoient avec Madame la Duchesse de Meklebourg, le Prince Frederic-Auguste de
          Saxe-Eysenach, le Prince Guillaume de Furstemberg, le Raugrave Charles-Loüis, Fils de
          l'Electeur Palatin, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> le Chevalier Lubomirski Grand Enseigne de
          la Couronne de Pologne. On avoit retranché un endroit dans la Tribune, en forme de petite
          Loge, pour placer Madame la Marquise de los Balbasés, Madame la Duchesse de S. Pierre sa
          Fille, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de Pastrane Ambassadeur d'Espagne, qui pour
          n'avoir point encor fait son Entrée publique, ne pût se trouver qu'<hi rend="i"
            >incognito</hi> à cette Solemnité. M<hi rend="sup">rs</hi> les Chevaliers de l'Ordre
          furent placez sur deux Bancs qu'on leut avoit préparez le long de la muraille, des deux
          costez du haut Dais. Il y avoit des Gardes depuis ce haut Dais jusqu'aux Portes de la
          Chapelle, qui furent ouvertes pendant toute la Cerémonie, sans que personne y entrast,
          tant M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de Luxembourg avoit bien donné les ordres, &amp; tant
          ils furent exactement observez. On avoit élevé un marchepied pour M<hi rend="sup">r</hi>
          le Cardinal de Boüillon, &amp; ce marchepied régnoit des deux costez de l'Autel jusque
          dans le fond de la premiere des huit petits Chapelles que je vous ay dit, qui sont en
          pareil nombre à droit &amp; à gauche. Au dessous des Bancs de M<hi rend="sup">rs</hi> les
          Chevaliers de l'Ordre, il y en avoit quelques autres qui furent remplis par ceux qui
          avoient mené les Princesses, ou qui avoient porté la queuë de leurs Mantes. Le Roy
          d'Armes, &amp; les quatre Hérauts s'avancerent jusques à l'Autel, &amp; se mirent à genoux
          des deux costez.</p>
        <p>Les Cent Suisses, les Tambours, les Fifres, &amp; les Trompetes, demeurerent sous la
          Tribune. La Musique estoit placée dans cette Tribune sur un grand Amphiteatre élevé pres
          de la Voûte. Celle de la Chambre estoit à la droite, &amp; la Musique de la Chapelle à la
          gauche. Il y avoit des Hautbois, des Flutes, des Trompetes, &amp; des Timbales, avec les
          Vingt-quatre Violons, &amp; du moins six-vingts Personnes qui chantoient ou joüoient des
          Instrumens. Tantost les Voix se faisoient entendre seules, tantost les Instrumens seuls,
          &amp; en suite tous ensemble. Ce mélange estoit la chose du monde la plus agreable. La
          diversité des mouvemens &amp; des changemens que produisoit tout ce grand Corps de
          Musique, fut merveilleuse. Cela dura une heure &amp; demie, &amp; il y avoit autant de
          travail qu'à un Opéra.</p>
        <p>Tout estant dans cette disposition, M<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon sortit
          de la Sacristie. Il se servit dans cette importante fonction des Ornemens de la Chapelle
          du Roy, qui sont tres-beaux. Les Ecclesiastiques officians le précedoient, &amp; il avoit
            M<hi rend="sup">r</hi> l'Evesque de Tulle pour Diacre d'honneur, &amp; M<hi rend="sup"
            >r</hi> l'Evesque de Sées pour Sousdiacre d'honneur ; qui l'accompagnoient. On les
          appelloit ainsi, à cause qu'il y avoit d'autres Prestres qui servoient de Diacre &amp; de
          Sousdiacre. Vous sçavez, Madame, dans quelle estime le mérite extraordinaire de M<hi
            rend="sup">r</hi> l'Evesque de Tulle l'a mis aupres de Sa Majesté. Elle ne s'est pas
          contentée de l'avoir nommé il y a environ six mois à l'Evesché d'Agen qui est tres
          considérable, Elle l'a gratifié en mesme temps de la joüissance des deux Eveschez, sans
          vouloir nommer à celuy de Tulle qu'apres que les Bulles de translation seront arrivées.
          Quand ce Prélat en alla remercier le Roy à S. Germain, Sa Majesté le retint pour prêcher
          l'Avent prochain dans sa Chapelle. C'est ce que je croy vous avoir déja mandé, aussi-bien
          que l'honneur qu'il a reçeu du Titre de Prédicateur ordinaire du Roy par Brevet, qui outre
          les apointemens, luy donne le privilege d'un Committimus que les autres Evesques n'ont
          plus. Le Roy l'a fait encor depuis peu son Grand Vicaire de S. Jean de Latran. Pour vous
          faire bien entendre ce que c'est, je vous diray, Madame, que le Souverain Pontife regnant
          dans le temps que Henry IV. fit son Abjuration, luy ordonna d'unir des Benéfices à
          L'Eglise de S. Jean de Latran de Rome, pour satisfation de son herésie. Ce grand Prince
          qui estoit bien aise de l'expier, se soûmit à ce que luy demanda le Pape, &amp; unit à
          l'Eglise que je vous viens de nommer, l'Abbaye de Cleyrac, qui est une des plus
          importantes de Gascogne, par son revenu, &amp; par le grand nombre de Benéfices qui y sont
          attachez, dont Sa Majesté se reserva la Nomination. M<hi rend="sup">r</hi> d'Alby, le
          dernier mort, qui estoit de la Maison du Lude, &amp; qui a esté le dernier Evesque, puis
          que c'est à présent un Archevesché, en avoit esté fait Vicaire Genéral lors qu'il estoit
          Evesque d'Agen. Depuis ce temps là personne n'avoit esté pourveu de ce Grand Vicariat.
            M<hi rend="sup">r</hi> de Mascaron l'est depuis trois ou quatre mois, &amp; il a la
          disposition de tous les Benéfices qui en dépendent. Je me suis éloigné un moment de ma
          matiere, dans l'assurance que vous ne desaprouveriez pas cette légere digression, prenant
          autant de part que vous faites à la gloire de l'illustre Prélat qui en est la cause. Je
          reviens à Monsieur le Cardinal de Boüillon. Il parut revestu de ses Habits Pontificaux,
          &amp; apres avoir salüé l'Autel, le Roy, &amp; la Reyne, il alla s'asseoir dans un
          Fauteüil qui luy avoit esté préparé sur les degrez de l'Autel. Il y avoit deux autres
          Fauteüils à l'un &amp; l'autre costé du sien, pour M<hi rend="sup">r</hi> l'Evesque de
          Tulle, &amp; pour M<hi rend="sup">r</hi> l'Evesque de Sées. Ces deux Prélats y prirent
          leurs places, &amp; alors le Roy d'Armes &amp; les Hérauts se leverent du lieu où ils
          estoient à genoux, &amp; firent leurs revérences accoûtumées d'abord à l'Autel, &amp; en
          suite au Roy, à la Reyne, à Monseigneur le Dauphin, à Monsieur, à Mademoiselle, &amp; à
          Monsieur le Prince de Conty. M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de Rhodes Grand Maistre des
          Cerémonies, fit de semblables saluts ; &amp; aussi-tost Leurs Majestez, suivies des
          Princes &amp; des Princesses qui estoient derriere Elles sur le haut Dais, en
          descendirent, &amp; allerent à L'Autel. Monseigneur le Dauphin, &amp; Monsieur menerent
          Mademoiselle jusqu'aupres de M<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon, &amp; luy
          quiterent la main. M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de los Balbasés, toûjours accompagné
          de M<hi rend="sup">r</hi> le Comte de Brionne, conduisit Monsieur le Prince de Conty au
          pied de l'Autel ; &amp; ce Prince s'estant mis à la droite de Mademoiselle, M<hi
            rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon commença les Cerémonies du Mariage. M<hi
            rend="sup">r</hi> de los Balbasés luy avoit présenté dans un Bassin treize Pieces d'or
          &amp; un Anneau d'or &amp; d'argent meslez ensemble. Ce Cardinal les benit, &amp; apres
          cette benediction, Monsieur le Prince de Conty mit l'Anneau au quatriéme doigt de la main
          gauche de Mademoiselle, &amp; luy donna les treize Pieces d'or en foy de mariage pour le
          Roy d'Espagne. Vous voudrez sçavoir sans-doute pourquoy ce nombre de treize. Je l'ay
          demandé à ceux qui en devoient estre le mieux instruits, &amp; ils n'ont pû m'en donner
          d'autre raison que celle d'un vieil usage. Pour l'Anneau d'or &amp; d'argent meslez
          ensemble, on prétend que l'or signifie l'amour, &amp; l'argent la pureté. Ce sont les deux
          choses qu'on doit le plus souhaiter dans l'importante union du Mary &amp; de la Femme. La
          Benediction Nuptiale suivit le don de l'Anneau. Je ne vous répete point les demandes qui
          furent faites par M<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon à Monsieur le Prince de
          Conty, s'il prenoit Marie-Loüise d'Orleans pour sa Femme au nom de Charles Second, Roy
          d'Espagne, dont il estoit Procureur ; &amp; à Mademoiselle, si elle prenoit le Roy
          d'Espagne pour son Mary. Ce furent les mesmes revérences du jour precédent, de Monsieur le
          Prince de Conty au Roy, &amp; de Mademoiselle au Roy, à la Reyne, à Monsieur &amp; à
          Madame, pour en obtenir la permission de répondre.</p>
        <p>Le Mariage estant fait, la nouvelle Reyne fut remenée sur le haut Dais par Monseigneur le
          Dauphin &amp; par Monsieur. Ce fut là que Mademoiselle d'Orleans, Madame la
          Grand'Duchesse, &amp; Madame de Guise, quitterent la queuë de sa Mante. Elle marcha la
          premiere, &amp; prit place au devant du Prie-Dieu, entre le Roy &amp; la Reyne. Pendant le
          temps qu'elle y retourna, on mit un Fauteüil pareil à ceux de Leurs Majestez, derriere la
          place qu'elle devoit occuper, sur la mesme ligne. Monseigneur le Dauphin luy ayant quitté
          la main, se mit derriere Elle, seul dans sa ligne, &amp; eut un Pliant &amp; un Carreau.
          Leurs Altesses Royales firent une ligne apres Monseigneur, &amp; eurent aussi chacun un
          Pliant &amp; un Carreau.</p>
        <p>J'oubliois à vous dire que les Princes &amp; Princesses de la Maison Royale qui
          remonterent sur le haut Dais apres que le Mariage fut fait, firent trois revérences
          chacun, la premiere à la Reyne d'Espagne, &amp; les deux autres à Leurs Majestez.</p>
        <p>La ligne qui suivoit celle de Monsieur &amp; de Madame ; fut remplie par Mademoiselle de
          Valois &amp; par Mademoiselle d'orleans au milieu, la premiere avant Madame la
          Grand'Duchesse à sa droite, &amp; la seconde Madame de Guise à sa gauche. On leur donna un
          Carreau à toutes quatre, mais sans Pliant.</p>
        <p>Monsieur le Prince de Conty, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> le Prince de la Roche-sur-Yon,
          firent une ligne particuliere derriere ces quatre Princesses, &amp; eurent comme elles
          chacun un Carreau. On en donna aussi à Monsieur le Comte de Vermandois, à Monsieur le Duc
          du Maine, à Mademoiselle de Blois, à Mademoiselle de Nantes, à Monsieur le Duc &amp; à
          Madame la Duchesse de Verneüil. Ces six derniers s'estant mis derriere M<hi rend="sup"
            >r</hi> le Prince de Conty, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> le Prince de la Roche-sur-Yon,
          formerent la mesme ligne qu'ils avoient faite avant qu'on eust esté à l'Autel. M<hi
            rend="sup">r</hi> l'Evesque de Condom qui faisoit la fonction de Premier Aumônier de
          Monseigneur le Dauphin, M<hi rend="sup">r</hi> l'Evesque du Mans Premier Aumonier de
          Monsieur, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> l'Abbé Tallemand Premier Aumonier de Madame, se
          mirent sur les degrez du haut Dais, &amp; y demeurerent debout, avec les hauts Officiers
          de Leurs Majestez &amp; de Leurs Altesses Royales que je vous ay déja nommez.</p>
        <p>Vous observerez, s'il vous plaist, ce que je vous ay dit d'abord, que l'Estrade estoit
          entierement couverte d'un Tapis de Perse à fond d'or, &amp; qu'il y en avoit un second de
          Velours violet, semé de Fleurs de Lys d'or, qui couvroit la moitié de ce premier.
          Mademoiselle de Valois, Mademoiselle d'Orleans, Madame la Grand'Duchesse &amp; Madame la
          Duchesse de Guise, estoient placées sur le bord où finissoit ce second Tapis. Ainsi ceuc
          qui formoient les lignes suivantes, n'estoient que sur le Tapis de Perse, quoy que les uns
          &amp; les autres fussent sur l'Estrade. Pour vous mieux représenter ces diverses lignes,
          &amp; les places que chacun y occupoit, j'en ay fait graver un Plant que je vous envoye.
          Vous vous réglerez sur le chifre que vous trouverez fort exactement marqué.</p>
        <note resp="author" place="margin"><hi rend="i">Avis pour placer les Figures</hi> : Le Plan
          de la Chapelle, doit regarder la page 176.</note>
        <l rend="i">Explication des Places</l>
        <l rend="i">marquées sur le Plan</l>
        <l rend="i">de la Chapelle.</l>
        <p>L'Estrade pour les Officians occupoit les deux costez de l'Autel, au bas duquel il vous
          est aisé de voir les degrez qui y conduisent.</p>
        <l>Le chifre I. marque la place du Prie-Dieu qui estoit devant le Roy &amp; les Reynes</l>
        <l>Le chifre 2. marque la place du Roy.</l>
        <l>Le chife 3. celle de la Reyne d'Espagne.</l>
        <l>Le 4. celle de la Reyne.</l>
        <l>Le 5. celle de Monseigneur le Dauphin.</l>
        <l>Le 6. celle de Monsieur.</l>
        <l>Le 7. celle de Madame.</l>
        <l>Le 8. celle de Mademoiselle de Valois.</l>
        <l>Le 9. celle de Mademoiselle d'Orleans.</l>
        <l>Le 10. celle de Madame la Grand'Duchesse.</l>
        <l>Le 11. celle de Madame de Guise.</l>
        <l>Le 12. celle de Monsieur le Prince de Conty.</l>
        <l>Le 13. celle de Monsieur le Prince de la Roche-sur-Yon.</l>
        <l>Le 14. celle de Monsieur le Comte de Vermandois.</l>
        <l>Le 15. celle de Monsieur le Duc du Maine.</l>
        <l>Le 16. celle de Mademoiselle de Blois.</l>
        <l>Le 17. celle de Mademoiselle de Nantes.</l>
        <l>Le 18. celle de Monsieur le Duc de Verneüil.</l>
        <l>Le 19. celle de Madame la Duchesse de Verneüil.</l>
        <l>Le 20. Celle de Monsieur le Chancelier.</l>
        <l>Le 21. le Banc de Monsieur le Marquis de los Balbases, de M<hi rend="sup">r</hi> le Comte
          de Brionne, &amp; de M<hi rend="sup">r</hi> de Bonneüil.</l>
        <l>Le 22. le Banc de Monsieur le Duc de Vendosme, de Monsieur le Grand-Prieur, &amp; de M<hi
            rend="sup">r</hi> le Duc de Crussol.</l>
        <l>Le 23. Degrez de L'Estrade, où plusieurs Duchesses, haut Officiers, &amp; autres
          Personnes qui avoient porté les queuës des Princesses furent placées.</l>
        <p>Les huit quarrez qui sont de chaque costé, sont les Chapelles, dans deux desquelles il y
          a deux degrez marquez.</p>
        <p>Je ne vous dis rien des Bancs des autres Personnes qui ont eu rang à cette Cerémonie. Ils
          sont marquez sur la Planche, &amp; vous n'avez qu'à lire pour connoistre ceux qui les
          remplissoient.</p>
        <p>Leurs Majestez ayant repris leurs premieres places, MM<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal
          de Bouïllon quita sa Chape, prit un Chasuble, &amp; apres estre venu donner de l'Eau
          benite à la Reyne d'Espagne, au Roy, &amp; à la Reyne, accompagné des deux Evesques
          assistans, il commença la Messe, qui fut chantée solemnellement par la Musique. MM<hi
            rend="sup">r</hi> l'Evesque de Sées chanta l'Epistre, &amp; MM<hi rend="sup">r</hi>
          l'Evesque de Tulle l'Evangile. Apres quoy ce dernier porta le Livre à M<hi rend="sup"
            >r</hi> le Cardinal de Boüillon, qui le baisa ; &amp; comme en suite il s'approchoit du
          haut Dais, M<hi rend="sup">r</hi> l'Evesque d'Orleans alla quelques pas vers luy, soûtint
          le Livre d'une main, en qualité de Premier Aumônier du Roy, &amp; ils le donnerent
          ensemble à baiser à la Reyne d'Espagne, au Roy, &amp; à la Reyne.</p>
        <p>Pendant les Encensemens qu'on fit apres l'Offertoire, le Roy d'Armes s'estant levé, salüa
          l'Autel, &amp; en suite la Reyne d'Espagne, le Roy, la Reyne, Monseigneur le Dauphin,
          &amp; Mademoiselle de Valois ; apres quoy il alla se mettre à genoux aupres de l'Autel,
          avec un Cierge allumé où l'on avoit attaché vingt Pieces d'or. M<hi rend="sup">r</hi> le
          Marquis de Rhodes fit les mesmes saluts ; &amp; aussitost Mademoiselle de Valois, qui
          devoit porter les Honneurs pour la nouvelle Reyne d'Espagne, quita sa place, &amp;
          s'approcha de l'Autel. Cette jeune Reyne descendit en mesme temps du haut Dais, &amp;
          s'avança vers ce mesme Autel, menée toûjours par Monseigneur le Dauphin, &amp; par
          Monsieur &amp; suivir de Mademoiselle d'Orleans, de Madame la Grand'Duchesse, &amp; de
          Madame de Guise, qui soûtenoient la queuë de la Mante de la maniere que je vous l'ay dit.
          On luy avoit préparé un Carreau de Velours violet à Fleurs de Lys d'or, sur les degrez de
          l'Autel. Elle s'y mit à genous devant M<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon,
          &amp; baisa la Bague qu'il avoit au doigt. Il estoit dans un Fauteüil, ayant à ses costez
            M<hi rend="sup">r</hi> l'Evesque de Tulle &amp; M<hi rend="sup">r</hi> l'Evesque de
          Sées, Diacre &amp; Sousdiacre d'honneur, qui avoient aussi chacun un Fauteüil. Alors M<hi
            rend="sup">r</hi> le Marquis de Rhodes prit le Cierge des mains du Roy d'Armes, &amp; le
          donna à Mademoiselle de Valois. La Reyne d'Espagne l'ayant pris de celles de cette
          Princesse, le présenta à M<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon, &amp; fut remenée
          en suite sur le haut Dais, où elle se mit comme auparavant entre le Roy &amp; la
          Reyne.</p>
        <p>Les mesmes cerémonies furent faites un moment apres. Un des Hérauts qui accompagnoient le
          Roy d'Armes, apres avoir salüé l'Autel, salüa la Reyne d'Espagne, le Roy, la Reyne,
          Monseigneur le Dauphin, Monsieur, Monsieur le Prince de Conty, &amp; M<hi rend="sup"
            >r</hi> le Duc de Crussol, qui devoit porter les Honneurs pour le Roy d'Espagne. Vous
          pouvez juger, Madame, de l'estime que ce Duc s'est acquise aupres de Sa Majesté, puis
          qu'Elle luy a fait l'honneur de le choisir, pour figurer (si on peut parler de cette
          sorte) avec la premiere Princesse du Sang. Les saluts de ce Héraut, qui alla en suite se
          mettre à genoux aupres de l'Autel avec un Cierge chargé du mesme nombre de Pieces d'or que
          le premier, furent suivis de ceux de M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de Rhodes. M<hi
            rend="sup">r</hi> le Duc de Crussol s'approcha en mesme temps de l'Autel, &amp; Monsieur
          le Prince de Conty fit la mesme chose que venoit de faire la Reyne d'Espagne. Il descendit
          du haut Dais, s'avança vers M<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon, se mit à
          genoux devant luy sur un Carreau, &amp; apres avoir baisé sa Bague, il luy présenta le
          Cierge que M<hi rend="sup">r</hi> le Duc de Crussol luy avoit donné. Ce dernier l'avoit
          reçeu de M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de Rhodes, qui l'avoit pris des mains du
          Héraut.</p>
        <p>Pendant tout ce temps, la Musique faisoit entendre ce qu'elle a de plus agreable dans ses
          diférens Concerts. Ainsi les oreilles n'estoient pas moins satisfaites que les yeux, qui
          de quelque costé qu'ils se tournassent, ne découvroient rien que de brillant, soit dans
          l'air auguste de tant de Personnes Royales, soit dans la magnifique parure d'un nombre
          infiny de Dames du premier rang qui remplissoient la Chapelle.</p>
        <p>Les Cierges ayant esté présentez, M<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon continua
          la Messe, &amp; changea deux fois de Mitre. La premiere n'estoit que de toile d'argent,
          &amp; la seconde estoit en broderie couverte de Pierreries.</p>
        <p>Vers l'<hi rend="i">Agnus Dei</hi>, le Roy d'Armes recommença ses Saluts, aussi-bien que
          Monsieur le Marquis de Rhodes, &amp; alors la Reyne d'Espagne descendit une seconde fois
          du haut Dais, &amp; alla se mettre à genoux sur les degrez de l'Autel. Deux Carreaux y
          avoient esté préparez sur un Drap de pied de Velours rouge cramoisy. Monsieur le Prince de
          Conty se mit à genoux sur l'un à la droite de cette Reyne. Aussitost M<hi rend="sup"
            >r</hi> l'Evesque d'Orleans d'un costé, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> l'Abbé de Lyonne de
          l'autre, étendirent un Poësle de brocard d'argent sur la teste de tous les deux. M<hi
            rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon se tourna, &amp; dit quelques Oraisons, apres
          lesquelles on osta le Poësle. La Reyne d'Espagne, &amp; Monsieur le Prince de Contu,
          demeurerent à genoux sur leurs Carreaux jusqu'à la fin de la Messe. M<hi rend="sup">r</hi>
          l'Evesque d'Orleans, &amp; M<hi rend="sup">r</hi> l'Evesque de Sées, donnerent ensemble la
          Paix à baiser à Leurs Majestez, la Reyne d'Espagne ayant toûjours les premiers honneurs.
          Apres la Benédiction, M<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon donna de l'Eau benîte
          à cette Reyne, &amp; à Monsieur le Prince de Conty, qui allerent en suite reprendre leurs
          places sur le haut Dais. Ce Cardinal n'eut pas si-tost dit le dernier Evangile, qu'il
          s'approcha du Prie-Dieu du Roy, avec les deux Evesques assistans. Il fit baiser le
          Corporal, à la Reyne d'Espagne, au Roy &amp; à la Reyne, &amp; M<hi rend="sup">r</hi>
          l'Evesque d'Orleans leur donna de l'Eau benîte.</p>
        <p>Le Livre des Evangiles fut apporté dans le mesme temps. M<hi rend="sup">r</hi> le
          Cardinal de Boüillon l'ouvrit, &amp; le présenta au Roy qui devoit jurer la Paix avec
          l'Espagne. M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de los Balbasés s'approcha pour estre témoin
          de cette derniere Cerémonie, &amp; Monsieur le Chancelier monta sur le haut Dais. Il fut
          suivy de M<hi rend="sup">r</hi> de Pompone Ministre &amp; Secretaire d'Etat, qui leût tout
          haut ce Serment de Paix. Le Roy le ratifia de vive voix, &amp; le confirma en touchant le
          Livre des Evangiles, que M<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon soûtenoit estant
          debout, &amp; ayant la Mitre sur la teste, &amp; sur lequel Sa Majesté à genoux tenoit sa
          main droite. On vit paroistre une gayeté toute particuliere sur le visage de ce Grand
          Monarque pendant ce Serment, apres lequel il se tourna vers M<hi rend="sup">r</hi> de los
          Balbasés, &amp; l'assura d'un air fort riant de la sincere intention qu'il avoit de
          l'observer.</p>
        <p>Je croy vous avoir marqué dans quelqu'une de mes Lettres, que le mesme Serment de Paix
          que jura le Roy à Fontainebleau, fut juré le mesme jour &amp; à la mesme heure à Madrid
          par le Roy d'Espagne, en présence de M<hi rend="sup">r</hi> le Marquis de Villars,
          Ambassadeur Extraordinaire de France.</p>
        <p>Apres que M<hi rend="sup">r</hi> de los Balbasés eut remercié le Roy, M<hi rend="sup"
            >r</hi> le Curé de Fontainebleau, qui avoit assisté à la Messe avec l'Etole, apporta le
          Registre ordinaire des Mariages de la Paroisse, &amp; le donna à M<hi rend="sup">r</hi> de
          Pompone. Ce Ministre le présenta aussitost au Roy avec une plume, pour signer l'Acte de
          témoignage selon la coûtume Leurs Majestez, &amp; apres Elles Monseigneur le Dauphin,
          Monsieur &amp; Madame, le signerent comme Témoins. Il fut signé par la Reyne d'Espagne
          &amp; par Monsieur le Prince de Conty, dans une Colomne particuliere.</p>
        <p>Cette grande &amp; auguste Cerémonie se termina enfin par le <hi rend="i">Te Deum</hi>
          que MM<hi rend="sup">r</hi> le Cardinal de Boüillon entonna, &amp; qui fut chanté par la
          Musique. Il estoit de la composition de l'illustre M<hi rend="sup">r</hi> Lully. Les
          Trompetes &amp; les Timbales y entroient avec une si grande justesse, que jamais on
          n'entendit rien de plus charmant.</p>
      </div>
    </body>
  </text>
</TEI>